Faut-il se faire débaptiser pour devenir ásatrúar ?

C’est une question qui revient très fréquemment dans les discussions avec des débutant.e.s qui commencent à s’intéresser à la religion nordique (note : cette question est loin de ne concerner qu’elle, mais comme je ne connais pas suffisamment les autres panthéons, je me limiterai à l’angle du panthéon germano-scandinave. De même, ma réponse se cantonnera ici à la religion catholique.)

Le présent article ne vise pas être l’exhaustif, mais simplement à y répondre clairement et rapidement. 

La question est intéressante (Il n’y a pas de question stupide. Par contre celleux qui n’en posent pas / ne s’interrogent à propos de rien risque fort de le rester) et elle sous-entends pas mal d’autres problématiques, mais pour rester dans le vif du sujet, non il n’est pas nécessaire de se faire débaptiser pour pratiquer l’Ásatrú. Vous pouvez tout à fait en avoir envie, mais vous n’en avez pas besoin

 

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1. Peut-on complètement annuler son baptême ? 

Il faut savoir que le fait de renier son baptême est une démarche purement administrative qui n’a aucun effet performatif. Ce n’est pas parce que vous vous faites « rayer » des registres de l’Église Catholique que le rituel est effacé / annulé. Il a bel et bien eu lieu et il est impossible de l’effacer.
En effet, quand vous reniez votre baptême, c’est en réalité votre refus d’être compté au nombre des membres de l’Église Catholique que vous affirmez. Il sera alors porté en marge de votre acte de baptême la mention de cette apostasie et la Paroisse ne vous fournira plus d’acte de baptême. Vous ne disparaîtrez pas des registres proprement dit, la mention du baptême, elle, ne disparaît pas¹

Il me semble avoir vu dans le passé quelqu’un qui a inventé un rituel de « débaptisation » : on va être clair, si vous ça vous fait du bien de pratiquer ce type de rituel, rien ne vous empêche de le faire. Mais encore une fois, ca ne changera pas le passé.

 

2. Est-ce une obligation pour pouvoir honorer Odin, Thor, Frigg et les autres ? 

Non, ca n’est pas nécessaire pour honorer les Anciens Dieux. Clairement, à part certaines personnes qui ont un kink pour les discours intolérants et extrémistes (spoiler alert : en général, ce ne sont pas non plus les gens les plus intéressants quand on commence à creuser) la plupart des pratiquant.e.s s’en foutent un peu ou ne vous demanderont pas d’aller renier votre baptême.
Au niveau de la pratique pure, pas mal de personnes ont été baptisées bébé et ca ne les a nullement empêché d’honorer les divinités qu’elles honorent à l’heure actuelle. Ca ne les a pas empêchées non plus de se faire tomber sur la gueule, pardon, appeler fortement, par certaines déités. Il est tout à fait possible que ce soit un élément rédhibitoire pour certaines, mais en tout cas dans le cas du panthéon nordique, je n’ai pas constaté de différentiel. 

Pourquoi cela ? 
Notamment parce qu’il n’y a pas de dogme obligatoire dans l’Ásatrú. A partir du moment où vous faites des offrandes, des blóts, bref que votre pratique quotidienne vise à honorer les divinités nordiques suivant des rituels (plus ou moins) précis, alors vous êtes de facto ásatrúar.

 

3. On me demande de faire annuler mon baptême pour participer à des cérémonies

Plus le temps passe, et plus je considère qu’un groupe (ou une personne) qui exigerait de vous une apostasie est à considérer avec énormément de prudence et beaucoup beaucoup de circonspection. Si vous n’avez absolument pas la possibilité d’assister à la moindre cérémonie ni au moindre rituel avant de le faire, c’est un énorme red flag, fuyez. 
Il y aurait tellement de points à développer que ca pourrait faire l’objet d’un autre article. 

 

4. Un rituel de protection et un lien avec les Ancêtres

A la base et pour faire court, le baptême c’est un rituel de purification et de protection. Prenons un moment pour regarder un instant les choses sous un angle un peu différent : la grande majorité des personnes ayant vécu en Europe occidentale au long de ces derniers siècles ont été baptisées. 

Woman's hands washing apple under running water
(image libre de droits)

Considérons maintenant l’importance du Culte des Ancêtres dans l’asatru : on peut également voir dans le baptême un lien spirituel avec nos ancêtres et notre lignée, même si aujourd’hui nos chemins se manifestent différemment.
Encore aujourd’hui, et même sans avoir une pratique religieuse particulièrement forte, des parents continuent de vouloir faire baptiser leur enfant « au cas où » et pour la protection que cela peut apporter. Jusque disons, au début du XXe siècle, on faisait baptiser un enfant le plus rapidement possible, de crainte qu’il ne meurt sans baptême et ne puisse accéder au Royaume de Dieu. (D’ailleurs aujourd’hui, on ne considère plus que des enfants morts sans baptême vont dans les limbes). Quelque part, c’est une manifestation rituelle du souhait de vouloir le mieux pour son enfant.
Contrairement à une idée assez répandue, le baptême ne fixe absolument pas l’engagement religieux du tout-petit ou du jeune enfant baptisé. On demande aux parents, aux parrains et marraines de s’engager à l’élever dans la foi catholique (ce que chacun.e interprète à discrétion) et cela s’arrête là. L’engagement sérieux dans la foi se fait lors de la Confirmation, qui se fait bien plus tard, et nombreuses sont les personnes qui n’ont pas fait leur Confirmation… 

 

5. Comment être comptabilisé.e comme ásatrúar ?

Enfin, si vous souhaitez absolument être reconnu.e comme asatruar, pour quelque raison que ce soit un moyen que ce soit « officiel » est d’adhérer à une asso, par exemple en France, Les Enfants d’Yggdrasil. Promis, cette asso ne demande à personne de renier son baptême, et il y a des parcours très différents. 

 

 

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¹ Peut-on forcer l’Église à effacer son nom du registre des baptêmes ?



 

L’Ancien et le Nouveau

Histoire d’un renoncement et d’un recommencement

tumblr_mg4fofA9701r3wk1zo1_1280Il y a une dizaine d’années, j’avais la possibilité d’avoir une pratique “de luxe”, et je ne mesurais pas à quel point les mots “de luxe” ne sont pas vain.
Je savais bien que c’était une chance, mais quand je relis un de mes anciens articles sur la question, si je trouve que le propos est pas faux, il y a quand même un truc qui me saute au yeux :

Je n’ai pas été foutue de l’appliquer à moi-même.

Voilà. Les gentils conseils de la Aranna de 2013, qui t’explique que Faire une offrande pendant que l’on prépare le repas, ou garder une bougie dans la cuisine et l’allumer à ce moment là, ils sont pas totalement hors sol mais il y a un paramètre qu’ils ne prennent pas en compte.

La frustration.

La putain. De. Frustration. Frustration d’avoir la sensation de se perdre. Frustration parce qu’on se languit de son ancienne pratique, de son ancien cadre, de ses anciens luxes (comme avoir un toit stable au-dessus de la tête et ne pas bouger tous les 3 mois ; avoir ses affaires à portée de main ; dormir la nuit), de son ancienne liberté, de tout.

Pendant presque sept ans, j’ai couru et soupiré en pensant à cette ancienne liberté de pratiquer. Et pendant que j’avais cette liberté de pratiquer, je soupirais en pensant à la vie que j’ai maintenant (sauf quelques détails dont je me serais passée, mais on ne choisi pas tout. Non, non, on n’a pas commandé à l’Univers avec panier en 1-clic certains paramètres. Et non c’est pas sensé être chose que “shit happens”. Du moins pas pour moi.)

C’est pas tout de savoir en théorie comment on peut concilier vie on-ne-peut-plus-ordinaire et vie spirituelle, encore faut-il arriver à y trouver l’épanouissement. Je parle pas d’être tous les jours cui-cui les petits oiseaux, mais au moins, ne pas avoir l’impression d’être pris dans le cercle infernal du hamster dans sa roue.
Hors, rien que le terme “vie quotidienne” c’est un vaste sujet : c’est quoi le quotidien ? Faire ses courses ? D’accord, rien que dans ce petit détail, il y a une foultitude de paramètres qui vont faire que l’aune de ce qu’est “le quotidien” d’une personne » sera “le luxe” de l’autre.
Alors en soit, on le sait. On sait qu’il y a “toujours pire ailleurs” et oui, on est toujours le privilégié de quelqu’un. Sauf que se dire “il y a encore pire que moi”, je ne pense pas que ca aide une personne non plus. Ca ne lui change pas son cercle infernal personnel d’un coup de baguette magique, et si ca pouvait être utilisé comme prévention contre le burn-out, ca se saurait.

Pour en revenir à nos moutons, c’est pas tout d’avoir des paramètres quotidien, encore faut-il y trouver nos propres bornes, nos propres structures, notre propre bidule intérieur qui fait qu’on arrive encore à y faire pousser les p’tites fleurs de notre vie rituelle / spirituelle / dévotionnelle, bref vous voyez ça en fonction de votre axe de pratique. Par exemple, personnellement, je n’arrive pas à faire certaines connexions si je ne suis pas absolument seule chez moi. De même, me dire “j’ai 1h, je n’ai qu’à faire ça”. Ca fonctionne pour passer un coup d’aspirateur, pas pour créer le pont et la déconnexion mentale suffisante pour arriver à faire un truc rituel.

Un autre point de détail : trouver l’épanouissement dans la vie quotidienne, ca dépend aussi de son axe de pratique, option bonus, des divinités que vous honorez plus particulièrement (ca c’est ma caillasse personnelle dans la chaussure).

Odin, la popote, c’est pas trop son truc. (Sauf quand il s’agit d’aller tirer pépouze l’hydromel de Gunnlöð. Et Gunnlöð au passage.)

Et ca, je crois que ca a été le plus dur.

Ca, et mon amour des recherches et des heures passées dans la lecture de 10 000 ouvrages, l’écriture, l’écriture, l’écriture. Sauf qu’aujourd’hui, la plupart du temps, quand j’ai du temps pour lire, le soir (moment sacré de la journée !), j’en profite pour lire de la fiction, en français, parce que je suis tellement cramée de mes journées, d’une part, que c’est pas la peine de lire en anglais.
D’autre part, quand je lis des trucs intéressants (Bisou le Vieux) en anglais etc, ca me donne deux envies : écrire, et faire des recherches complémentaires. Et je me souviens que je n’ai pas le temps et qu’il faut faire des choix.

Est-ce que c’est ma nouvelle pratique qui m’a trouvée ou est-ce que c’est moi qui ait trouvé ma nouvelle pratique ?
Bonne question, je n’en sais rien. Je dirais un peu des deux. Quand on est dans une certaine optique, on tend à être plus réceptif à des divinités correspondant à cette optique. Et quand des divinités correspondent à des optiques qui nous parlent, on se rapproche un peu plus de leur axe dévotionnel.

Il m’a fallu du temps pour accepter le changement : pour cesser de vouloir absolument revenir un type de pratique comme celle que j’avais avant d’avoir une cohorte de petits champignons (les petits champignons, c’est du spore !). Si la vie est parfois comparée à une succession de saisons, on peut considérer qu’il y a aussi des saisons dans la vie spirituelle (et pas uniquement quatre, ni dans l’ordre canonique).

Se pose aussi la question de “après avoir vécu une énorme épreuve de passage, est-il simplement possible de revenir à la personne que l’on était avant ?” Et d’ailleurs, pourquoi le faudrait-il ?

Du coup, aujourd’hui, si mon chemin dévotionnel avec Odin n’est pas terminé, au quotidien, l’expression de ma pratique et tout ce qui la sous-tends, ca passe par une quantité de trucs très friggesques.

Mais ceci est une autre histoire.

[Source de l’image inconnue, trouvée sur tumblr il y a une décennie et sauvegardée dans mes dossiers.]

[Traduction] Le Sumbel

[Edit du 02/04/2024 : je republie sur le blog d’anciennes traductions faites il y a longtemps pour le site de La Renarde. Ce site n’existe plus aujourd’hui, mais j’ai sauvegardé les traductions qui me paraissaient encore pertinentes.]

Trouvé sur Irminsul Ættir Texte écrit par Susan Granquist © 2001
Traduction & adaptation par Aranna © 2012

489-490

Site nu to symle ond onsæl meoto,
sigehreð secgum, swa þin sefa hwette.

À présent prends place au festin et dévoile ton dessein,
parle gloire et victoire aux hommes en suivant l’élan de ton âme *

Beowulf

Le sumbel (sumbl en vieux norrois) est un rituel solennel où les participants s’assoient ensembles, buvant et discourant d’une manière qui ressemble beaucoup aux toasts que nous portons aujourd’hui au cours d’un diner formel.

Paul Bauschatz dans The Well and the Tree, donne une brève description de ce rituel dans le contexte de la cosmologie nordique et germanique.

« Le fait de boire agit en interaction avec le fait de parler, chacune de ces actions permettant l’accomplissement de l’autre. Pendant un tel acte, le pouvoir de toutes autres les actions est concentré sur le moment du rituel et le canalise à l’intérieur des évolutions constantes de toutes les actions passées et présentes. La combinaison des mots, les actions exprimées et les éléments sémantiques de la boisson et de la coupe reproduisent à la fois le flux continu de l’Orlög et l’eau puisée pour nourrir Yggdrasil, les deux principales tâches des Nornes. Si cette action est représentative de la puissance et de la présence du passé dans le monde des hommes, alors les paroles rituelles prononcées deviennent partie intégrante de ce passé, disparaissent dans la boisson. Tandis que le convive s’enivre, ses actions et la boisson ne font plus qu’un, tandis que le tout est devenu une des strates à l’intérieur du puit. » 1

On fait passer une coupe de boisson alcoolisée : le fait que ce soit alcoolisé constitue une part importante du symbolisme de ce rituel puisque la boisson obtenue résulte d’une transformation des ingrédients de base, ce qui la place au-delà de la réalité ordinaire. La coupe symbolise le puit. Au cours du sumbel raconté dans Beowulf, Wealtheow fait soigneusement passer la coupe, dessinant un parallèle avec les Nornes qui versent l’eau sur les racines de l’arbre permettant à ce dernier de se nourrir et de croître.

Tout ce qui est dit au cours d’un sumbel est important et doit être considéré avec prudence, puisque ces mots deviennent une partie de l’Orlög, mêlant le passé et influençant le cours des événements à venir.

Mais au-delà du fait de s’enorgueillir de ses actes, de rendre hommage aux ancêtres ou d’honorer les autres avec des cadeaux et des chants, ce rituel est également une forme de prière, de lien sacré avec les dieux qui, depuis leurs demeures, participent également au sumbel. C’est des Dieux que proviennent le don du brassage, les runes qui se combinent pour créer de puissants sortilèges, tout autant que l’hydromel de l’inspiration et la poésie qui en découle.

Si nous nous réunissons pour honorer des hommes, ne devrions-nous pas, comme autrefois, honorer également les Dieux et la mémoire des morts ? Honorez-les comme ils se sont eux-mêmes assis et ont honoré ceux qui les ont précédés et ceux qui les ont rencontrés, au cours de cette assemblée.

1 : Bauschatz, Paul, The Well and the Tree: World and Time in Early Germanic Culture, University of Massachusetts Press, Amherst, 1982., p. 77-78

* La traduction française des vers de Beowulf est tiré du livre Beowulf, lettres gothiques, traduction et notes de André Crépin, Le livre de poche.

[Miscellanées] Witchcraft Asks 3/5

43 . Quel est ton outil de sorcière favori ?

Là tout de suite, aucune idée. [Le moi sarcastique : « Mon cerveau ».]
J’ai eu, il y a vingt ans, un superbe athamé à l’histoire un peu particulière. J’avais repéré un artisan -je crois me souvenir que c’était par le biais d’un forum darkos que je fréquentais à l’époque où on a commencé à avoir internet à la maison- qui fabriquait des dagues en collaboration avec un autre mec, et je lui avais envoyé un mail pour en acheter un. Il les fabriquait à la commande et ca prenait du temps. Entre temps je faisais plein de rêve avec une dague qui ne ressemblait pas à ce que j’avais commandé. Finalement, je devais passer aux caves St Sabin pour le récupérer. Et là, papoum, le mec me dit qu’il y a eu un méga pépin avec ma commande, parce que c’était pas DU TOUT ce à quoi il devait ressembler, qu’il comprenait pas trop. J’ai fais genre « mmmmh, bon on va voir si je le prends quand même », et j’ai retenu un braillement en voyant apparaître exactement la dague qui apparaissait dans mes rêves. J’ai pas moufté, et le mec me dit qu’il peut ou me faire un bon rabais, ou alors m’en refaire un.
Je l’ai pris. Avec le rabais.
Cet athamé m’a été confisqué par la douane française de retour d’une initiation en Suisse. Un sale moment de ma vie où j’ai loupé mon train, failli finir en G.A.V. etc. J’ai « juste » loupé mon train, un des douaniers m’ayant discrètement remis mon fric au moment où je partais. (Pour être honnête, je pense que c’est surtout parce que la personne avec qui j’étais était en mode ultra défensif, et a insisté pour rester présent, en menaçant de prévenir qui de droit, qu’il était « citoyen de la confédération helvétique et que ca n’allait pas se passer comme ça ». Je pense qui si j’avais été complètement seule, j’aurais probablement eu droit à la G.A.V et à plus d’emmerdes.) Il a dû finir au musée des saisies ou je sais pas quoi. Après tout ce temps j’en suis encore dégoutée. Sachant qu’on m’a fouillée parce que j’avais un look gothique… (oui, les cols blancs, eux, passaient tous la douane pépouze. Dans les gens fouillés limite à poil, y’avait un hippie, un rasta. (En gros, soit des looks alternatifs, soit des personnes racisées, joker pour ceussent qui avaient les deux. Bah oui, les cols blancs ne prennent pas de drogue, c’est connu.)

J’aimais aussi beaucoup mon vieux tambour, (encore une histoire de fou…) mais la personne (hum) à qui je l’avais laissé en gardiennage pendant que j’habitais à l’étranger a fait de la merde et sa négligence a ruiné mon tambour. (Oui, toi. Sache que je suis toujours un peu fâchée même dix ans plus tard.)

Du coup, bah les objets c’est bien, mais de la façon dont je vois les choses -et par rapport à mon vécu- quand ils sont magiques, ils ont une légère tendance à vivre leur vie propre, et une fois la tâche accomplie, pouif, fini.

44. As-tu déjà fabriqué tes outils magiques ?
Ouais. Des cordes rituelles aux runes, en passant par les huiles, baumes et tout le saint frusquin. Je suis pas en mesure de tout fabriquer, mais si je peux c’est mieux.
La bouffe aussi, parce que oui, la bouffe et les offrandes ca compte, spécialement si on bosse avec Frigg / Frau Holda.

45. As-tu déjà travaillé avec des créatures magiques telles que les fées ou les esprits ?

Dans « spirit-worker » il y a « spirit ». De manière générale, je fais pas tellement la distinction ; en même temps, l’âge, les obligations et les alignements venant, je pratique plus avec des esprits « domestiques » ou limitrophes qu’avec des esprits sauvages des grandes forêts.
Les fées, en tout cas sous cette dénomination là -et non pas fluffy- oui, quand j’étais plus jeune. Je les voyais d’ailleurs. La dernière fois que j’en ai vu une physiquement  (c’est à dire pas en rêve ou en voyage), c’était il y a deux ou trois ans près du fil à linge, devant la haie, chez moi, pendant que j’étais posée pépouze à boire mon café du matin, quelques jours après Beltane.)
Par contre, là tout de suite, je serais bien en peine de vous expliquer comment je savais que l’esprit en question rentrait dans la catégorie « fée ».

Y’avait le gobelin des chiottes chez mon père. Qui était bien flippant d’ailleurs, merci le double miroir en angle. Ma sœur préférait sortir pisser dehors dans le jardin que d’aller à 3h du mat’ dans ces wawas.

46. Pratique-tu la magie des couleurs ?
La m.a.g.i.e d.e.s c.o.u.l.e.u.r.s ? Kézako ?
Alors, je connais très bien la magie jaune devant marron derrière : celle là elle fout toujours la merde. Non c’est pas ça ?
Plus sérieusement : choisir des codes couleurs pour des trucs rituels, c’est surtout pour aligner le mental et ajouter un p’tit booster. Pas obligatoire, parfois pratique si on est en « ressources limitées / temps / effort, etc ». Et c’est surtout relatif à la culture majoritaire dans laquelle on baigne.
Disons que c’est un truc auquel on peut avoir envie de sacrifier, parce que ca nous parle, parce qu’on trouve que c’est plus sympa, parce qu’on se met plus dans le mood, c’est la personne qui voit comment elle veut faire.
La magie intrinsèquement, je trouve pas qu’elle ait des couleurs, je divise pas les travaux comme ça (parce que sinon, oui, il y a quand même des grandes voies, et non on ne peut pas être bon.ne en tout).

47. As-tu ou as-tu eu un mentor ou un maître en magie ?
Alors, un mentor humain, non, pas directement. J’ai par contre eu la possibilité de croiser une personne très cheloue. Qui pratiquait, et pas qu’un peu. Le résultat du rasoir d’Ockham, c’est que oui la magie existe, y compris ses aspects les moins sympathiques.
Cette personne m’a appris quelques trucs on va dire. Y compris à coup de pompes dans le cul.

48. Quel est ton moyen de shopping favori pour les ingrédients magiques ?
Soit je peux me démerder pour les avoir de la main à la main / les faire pousser / cueillir / etc. Sinon internet et un moyen de paiement ca règle la question. Même pas besoin de sortir et de parler à des gens. (vu que je trouve pas ça en boutique par chez moi d’une part, de deux les boutiques ésos « classiques », je trouve qu’on s’y sent souvent un peu soit jugé soit pris de haut soit catalogué… et c’est/c’était souvent uniquement des trucs New Age / les anges / etc.). 7

49. Crois-tu au destin ou à la prédestination ?

A l’örlög et le wyrd, qui sont un peu différents. J’ai la flemme de me lancer dans une grande explication ici et maintenant.

50. Que fais-tu pour te reconnecter quand tu te sens décalée par rapport à ta pratique ?
Je fous tout le monde dehors.

51. As-tu déjà vécu des expériences surnaturelles ?
C’est arrivé je crois bien. 

52. Quelle est ta plus grosse bête noire en magie ?
Les reel instagram pour nous apprendre à être une vraie sorcière ?

53. Aimes-tu l’encens ? Si oui, quelle est ta fragrance favorite ?
J’aime bien l’encens en résine, genre l’opoponax et plein d’autres, mais j’ai plus le droit d’en faire brûler chez moi, sauf de manière très très occasionnel. Snif.
54. Gardes-tu un journal de tes rêves ?

Oui, je le garde précieusement. J’avais aussi un blog privé sur lequel je les détaillais, ce qui me permettait de pouvoir les faire lire facilement (et parce que vu les rêves à tiroirs, ca prends des plombes à décrire.) Aujourd’hui, c’est souvent un sms ou un mail à une amie chère, parfois quelques mots en style télégraphique, vu que j’ai pas franchement le temps le matin. Beaucoup se sont fait mangé par les trouze mille réveils nocturnes au passage.

55. Quel a été ton plus gros désastre en magie ?
Quelques fumbles qui se sont fini en « Putain Kitsu, on ne fait pas ça, jamais. ON NE FAIT PAS CA, JAMAIS ! »

56. Quelle a été ta plus grande réussite en magie ?
Ca dépend de ce qu’on appelle une réussite. Ca dépend des paramètres de la question : est-ce que c’est « j’ai voulu faire ça et j’ai eu ça » (parce que pas certaine que ce soit toujours une réussite) ou est-ce que c’est un alignement plus subtil ?
Bon allez, je vais citer une anecdote de « réussite en matière d’écoute de la Brochette ». Je devais aller faire mon passeport pour émigrer. Genre ca urgeait. Aller dans une mairie pour refaire ses papiers, ou toute procédure visant à => gros gros gros trauma familial + bien mauvais souvenirs = c’est l’Everest en tong option crise de panique/anxiété. Hors ce jour là, d’un coup, j’ai comme une voix dans ma tête qui me fait « va à la mairie faire ton passeport. Maintenant ». Moi « nan, un café et une clope et demain, et tout à l’heure et… » La Brochette « Non, maintenant. Tu pars, MAINTENANT ». Je trouve ca con mais je prends ma pochette et je pars vu que ca braille.
J’arrive au guichet de la mairie, où la meuf me tire la tronche et m’explique que non, ca marche pas comme ça madame, faut prendre un rdv en ligne etc, qu’il y a une attente ». Puis dans la foulée elle rajoute « mais vous avez une chance folle, parce que là, très précisément dans 2 minutes, il y a un créneau de libre suite à une annulation. Il aurait pas fallu arriver dans 5 minutes Madame ».

Voilà.

C’est complètement con, mais c’est très très utile au quotidien (spécialement avec des troubles anxieux.)

57. Qu’est-ce qui, dans ta pratique, te fais te sentir idiote ou embarrassée ?
Ma percevalite aigüe ? Je veux dire : je raconte des trucs qui ont l’air obvious pour tout le monde, et tout le monde ne bite pas pourquoi je ne bronche pas. Basiquement, je décris en détail l’éléphant dans la pièce sans comprendre que le truc est dans la pièce. Et là, 10 000 ans plus tard, je fais « ah mais en fait, y’a pas un rapport avec l’éléphant qui est là ? Et depuis combien de temps il est là lui ? J’avais pas compris ca comme ça ». Et c’est le face palm collectif. Perceval power. (Accessoirement, c’est aussi parce que je refuse tout montage en chantilly de certains trucs, du coup ca met beaucoup beaucoup de temps de pour réaliser que nooooon, c’est pas dans ma tête.)

58.  Crois-tu que l’on peut être athée, catholique, musulman ou d’une autre foi et être tout de même une sorcière ?
Alors, la sorcellerie, c’est pas synonyme d’être « wiccan » ou whatever hein. Donc oui sur le plan culturel / pratique / fonctionnel.
Par contre, au niveau stricto sensu du catéchisme de l’église catholique (dernière édition 1992 de mémoire, quoique qu’avec le François, devrait y avoir une nouvelle version mais j’ai la flemme de chercher), techniquement, on ne peut pas être un « bon catholique » et faire tout un tas de trucs, notamment pratiquer le tirage des cartes, la sorcellerie, etc.
Après, est-ce qu’au niveau syncrétique c’est possible ? Oui.
Est-ce qu’on peut inclure des saint.e.s et des divinités anciennes dans sa brochette ? Ca peut.
Est-ce que c’est « conforme à l’éthique » : du côté catho stricte, non.
Est-ce que les ancêtres le faisaient ? Certain.e.s oui.
Est-ce que l’équation « les ancêtres le faisaient » est toujours synonyme de truc à faire / à pas faire / bref est fixable comme un x dans une équation ? Non.
Est-ce que je juge les gens qui font les deux ? Non.

59. Te sens-tu parfois mal à l’aise, peu sûr ou même effrayé par la pratique des charmes ?
(Ca sent la traduction cheloue cette phrase.) Effrayée non. Par contre, réfléchir avant d’agir c’est globalement une bonne idée, domaine sorcellerie ou pas. C’est comme avant de changer une ampoule, tu fais gaffe à pas avoir les mains mouillées et si possible à éteindre avant.

60. T’es-tu jamais tenu à un standard dans ta sorcellerie tout en sentant que tu pourrais ne jamais l’atteindre ?
En sorcellerie je sais pas, en revanche, mon étoile du berger en terme d’écriture de trucs sur le Vieux, c’était la thèse de Gundarson. Et pas la version « adaptée pour les polythéistes », la vrai. Jusqu’à ce que quelqu’un de sagace et avisé me fasse remarquer que j’avais pas besoin d’écrire l’équivalent d’une thèse de l’université de Cambridge pour que ca en vaille la peine (d’ailleurs, en fait, y’en a même eu plusieurs qui m’ont dit la même chose). Y’a des comparaisons qui nous motivent à monter le niveau et à nous dépasser. Et y’a qui nous plombent et nous paralysent. Parfois la frontière entre les deux est mince.

61. Y a-t-il quelque chose, relatif à la sorcellerie, que tu désirerais maintenant ?
Du temps dans une maison vide ? Que nous puissions enfin vivre dans la maison-vraie-maison pour entretenir des liens avec ma terre.

62. Quelle est ta rune favorite ?
La rune « Ké-naze », comme cette question. Allez, on va dire que j’ai un petit kink pour Ansuz.

63. Quelle est ta carte de tarot favorite ?
Alors niveau esthétique du dessin, ca dépend du deck.
Pour tout le reste, je m’en fous.